Un travail de thèse répond « mauvaise expérience gustative, manque de connaissances et de temps pour les cuisiner, stéréotype de plats des pauvres, effet digestif désagréable » et pointe une communication et une offre qui doivent évoluer.
Comprendre la faible consommation de légumineuses chez les consommateurs non végétariens a été le sujet de thèse de Juliana Melendrez Ruiz. Un sujet d’actualité en raison de la nécessaire transition alimentaire vers des sources de protéines plus durables. Pascale Hébel, directrice du pôle consommation du Credoc en a fait une analyse pour l’Académie d’Agriculture.
Les derniers travaux scientifiques mettent en évidence qu’il ne sera pas possible de nourrir la population croissante d’ici 2050 avec des régimes alimentaires aussi riches en protéines animales qu’actuellement. Les protéines végétales pourraient être une seconde source de protéines, d’autant qu’elles sont moins chères à produire tant du point de vue monétaire qu’environnemental. Les légumes secs ont notamment des atouts nutritionnels, durables et agronomiques (fixent l’azote). Ils ont été consommés de façon importante jusqu’à être progressivement délaissés pour atteindre en 1985 seulement 1,4 kg/habitant/an.
Les freins décrits dans la littérature
Les données de la littérature rapportent que la chute de la consommation des lentilles est due à de mauvaises expériences gustatives dans les cantines, le manque de connaissance pour les cuisiner, le manque de temps, les stéréotypes de plat des pauvres, le manque d’innovation de produits faciles à consommer, les temps de préparation, les effets digestifs (gaz intestinaux) et le fait que cet aliment ait longtemps été considéré comme un féculent dans la pyramide alimentaire.
Une perception positive mais limitée
Le travail de thèse de Juliana Melendrez Ruiz rapporte que les légumes secs bénéficient d’une perception positive tant en France qu’en Espagne. Seule une faible proportion des consommateurs indique un dégoût pour ces produits. Cependant, l’image qu’ont les consommateurs des légumes secs se limite aux lentilles, et les légumes secs sont perçus comme des féculents de bonnes qualités gustatives et culinaires. Au contraire, les professionnels de l’industrie des légumineuses les associent aux protéines et à la naturalité. Une divergence de points de vue qui rend probablement difficile une communication efficace sur ces produits. Considérés comme des féculents et accompagnements, les légumes secs ne peuvent pas être envisagés comme des substituts à la viande. Ce sont le plus souvent des femmes, des moins de 40 ans et des très diplômés qui choisissent les légumes secs comme ingrédients principal d’un repas.
Les rendre plus attractifs
Une étude en supermarché virtuel avec un outil « d’eye tracking » a mis en évidence que les produits à base de légumineuses étaient rendus moins attractifs par la présence d’autres produits sur le rayon comme les légumes ou les féculents classiques. Ils doivent donc être vendus seuls. Une autre expérimentation en supermarché virtuel révèle que ce sont les incitations environnementales qui ont le plus d’effet sur les choix de légumes secs, plutôt que les incitations santé ou plaisir. Les légumes secs sont perçus comme moins savoureux que les légumes frais. Les consommateurs Espagnols semblent partager les représentations des Français même s’ils considèrent davantage que les légumes secs appartiennent à leur culture. Enfin, Julia Melendrez Ruiz estime que pour améliorer l’image des légumineuses, il faudrait qu’ils soient proposés plus régulièrement en restauration scolaire ou d’entreprise à condition d’être cuisinées et présentées de façon palatable.
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La transition végétale sera difficile mais pas impossible |
Source : Analyse de P Hebel faite à partir d’une thèse : Comprendre la faible consommation de légumes secs chez les consommateurs non végétariens : combinaison d’approches directes et indirectes afin d’identifier les barrières et les opportunités Hebel P https://www.academie-agriculture.fr/publications/presentations-de-theses/comprendre-la-faible-consommation-de-legumes-secs-chez-les
C. Costa
© Société Française de Nutrition. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Date de publication : 16/03/2022
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