Encore marginal en Europe, le nombre de végétariens augmentera dans les années à venir, selon une étude du CREDOC. En cause, l’individualisation des pratiques alimentaires, le nouveau rapport aux animaux et l’augmentation de l’offre végétarienne. De quoi favoriser l’accroissement de la population végétarienne.
C’est la question posée en 2018 par FranceAgriMer et l’Ocha au Credoc et dont les résultats d’enquête viennent seulement d’être rendus publiques. L’objectif pour FranceAgriMer était de comprendre les fondements de la consommation végétarienne et d’évaluer son étendue dans la population de 4 pays européens (la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Espagne).
Pour y répondre, le CREDOC a procédé en deux temps : une analyse qualitative (revue de la bibliographie et entretiens avec des experts) pour identifier les fondements de ce phénomène et son évolution et une analyse quantitative (enquête auprès de populations représentatives des 4 pays) pour mesurer son importance et identifier les caractéristiques des individus et leurs motivations.
L’étude du CREDOC s’est focalisée sur 4 types de consommations végétariennes : le végétarien, le végétalien (ne consomme pas de produits ni sous-produits animaux), le végan (ne consomme ni n’utilise de produits animaux) et le flexitarien.
L’analyse qualitative rappelle que le végétarisme n’est pas un phénomène nouveau et que la consommation de la viande a longtemps été restreinte pour des raisons économiques ou religieuses. Les racines du végétarisme remontent à l’Antiquité et le mouvement végétarien se développe à partir de la fin du XVIIIe siècle. Cependant, le végétarisme semble aujourd’hui trouver un terrain favorable lié à la conjonction de plusieurs facteurs comme l’individualisation des conduites alimentaires, l’éloignement du monde rural, les avancées sur la conscience animale, le militantisme médiatique, le développement de l’offre végétarienne et végane ou encore le discours des politiques publiques incitant à limiter la consommation de viande. Pour les spécialistes interrogés, ce phénomène n’est pas voué à disparaître mais devrait encore progresser.
L’enquête quantitative réalisée en France (1009 individus), Espagne (865), Allemagne (820) et Royaume-Uni (826) rapporte que le végétarisme est un phénomène encore marginal. Si la notion de végétarisme est bien connue (par plus de 90 % des répondants), les personnes s’en déclarant ne sont que 5,6 % (8 % au Royaume-Uni, 5,2 % en France, 5,6 % en Allemagne et 2,8 % en Espagne) sachant que les végétariens dominent par rapport aux végétaliens et aux végans qui sont marginaux. À ceci s’ajoute un décalage entre l’identité déclarée et la pratique. Car sur 100 végétariens auto-déclarés, 51 % consomment de la viande au moins une fois par semaine, 16 % au moins un type de viande tous les jours et 8 % moins d’une fois par semaine. La notion de végétarisme est très relative, certains considérant l’exclusion d’un seul type de viande (rouge souvent) comme une forme de végétarisme ou ne considérant pas les plats préparés à base de viande ou les charcuteries comme de la viande, d’autres réservant leur végétarisme dans certaines circonstances seulement.
Le caractère marginal du phénomène rend difficile la mesure de sa progression réelle à l’échelle européenne. Toutefois, elle s’inscrit dans la tendance plus large de la baisse de consommation de viande confirmée par l’enquête quantitative : 50 % des Français, 42 % des Allemands, 41 % des Espagnols et 36 % des Britanniques déclarent avoir réduit leur consommation de viande par rapport à 2017. Au moins 19 % des répondants se disent flexitariens dans les quatre pays étudiés (20 % en France, 19 % au Royaume-Uni, 23 % en Espagne et 26 % en Allemagne).
Les logiques de non-consommation de viande ou de sa réduction sont multiples et varient selon les pays, le profil sociodémographique ou l’identité du répondant. Les considérations de santé motivent ce comportement (53 % des répondants), davantage en Allemagne et en Espagne. Les conditions d’élevage sont citées par 40 % des sujets (davantage en Allemagne), le fait « d’élever des animaux pour les tuer » est cité par 35 % (davantage au Royaume-Uni). L’environnement arrive en 4e position (30 %) suivi par le prix (25 %) et le dégoût pour la viande (19 %).
Mais si la santé est la raison la plus citée, elle est plutôt évoquée par les flexitariens (69 % versus 26 % des végétariens) et les plus âgés (35 % des 55-64 ans versus 11 % des 25-34 ans), tandis que la cruauté du principe d’élevage est davantage citée par les végétariens (74 % versus 31 %) et par les plus jeunes (27 % des moins de 34 ans versus 19 % des 55-64 ans). Quant au dégoût pour la viande, il trouve un écho particulier chez les végétariens et les jeunes générations. Enfin, le prix des viandes cité par divers profils de consommateurs est un argument à ne pas occulter même s’il n’est pas au cœur des décisions. C’est une motivation importante en France (31 % la cite) et au Royaume-Uni (32 % la cite).
Même très médiatisé, le végétarisme est encore une tendance marginale. À tel point qu’il est encore difficile d’établir le profil d’un végétarien dans chaque pays. Le phénomène semble néanmoins attirer davantage les femmes, les moins de 35 ans et les populations urbaines ou dotées d’un fort capital culturel (cadres ou très diplômés, selon le pays). Au contraire, le flexitarisme, plus répandu, touche toutes les tranches d’âge et semble répondre à des logiques différentes, notamment celle de santé et/ou s’inscrivant dans la tendance à « consommer moins mais mieux ».
C. Costa « © Société Française de Nutrition. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés ».
Panorama de la consommation végétarienne en Europe — synthèse FranceAgriMer - ÉDITION octobre 2019. http://www.franceagrimer.fr
Date de publication : 03/03/2020
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