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Nous connaissons depuis longtemps l’importance de la nutrition sur la santé et la croissance pendant l’enfance. Les nouvelles recherches portant sur l’impact à long terme de la nutrition ont déplacé leur attention sur les aspects épigénétiques, qui jouent un rôle majeur sur la santé, y compris celle des adultes.

Les études à long terme et les analyses détaillées d’aspects très précis de la nutrition infantile ont donné lieu récemment à des résultats étonnants. Les chercheurs portent un intérêt croissant à la nutrition pendant la première année, tant celle reçue par le nouveau-né après sa naissance que celle déjà reçue dans le ventre de sa mère, car il semble à présent évident qu’il existe une relation étroite entre la nutrition à cette étape précoce de la vie et ses effets sur l'état de santé tout au long de la vie.

Importance de la nutrition pendant la petite enfance

Les 1000 premiers jours de vie et d'alimentation – de la conception jusqu’à la fin de la 2ème année – ont un impact critique sur les chances biologiques d’un individu. Pendant cette période, les enfants sont encore très “malléables”. Il existe aujourd’hui un nombre considérable de résultats de recherches prouvant que l’influence de la nutrition commence dans le ventre de la mère. Ceci représente une opportunité énorme mais également un risque considérable.

D’un côté, les enfants sont particulièrement sensibles durant cette période à une insuffisance d’apports en nutriments importants tout comme à un apport excessif en certains aliments et polluants, avec pour conséquence des dommages irréversibles. D’un autre côté, cette période critique offre également l’opportunité d’améliorer les capacités fonctionnelles de l’organisme en procédant à des interventions ciblées, et par conséquent d’apporter des réponses aux nouveaux enjeux de santé.

Contribuer à la lutte contre les pathologies les plus répandues

Parmi les pathologies les plus courantes de notre monde moderne influencées par la nutrition précoce ou qui en résultent, prédominent l’obésité, les maladies associées à l’obésité et la dermatite atopique – actuellement la plus fréquente des maladies allergiques chez les nourrissons et les jeunes enfants.

En Europe, 14 millions d’enfants sont aujourd’hui en surpoids et 3 millions d’entre eux sont obèses (Kurth, 2007). Dans le monde, le nombre d’enfants en surpoids atteint 43 millions (WHO, 2011). Or, les enfants en surpoids et obèses ont un risque accru d’être en surpoids ou obèses à l’âge adulte (WHO, 2011). L’obésité est fréquemment associée au diabète de type 2. Les coûts liés au traitement du diabète de type 2 représentent aujourd’hui à eux seuls 8% de l'ensemble des coûts de santé en Europe.

Les chiffres concernant les maladies allergiques ne sont pas moins impressionnants : en France, la prévalence de la dermatite atopique est de 6 à 9% chez les enfants de moins de 15 ans*, ce qui représente près de 900 000 enfants concernés. En Europe, entre 9,5 et 13 millions d’enfants développent au moins une forme transitoire de dermatite atopique avant de démarrer leur scolarité.

Il est donc primordial de trouver des solutions qui permettront de réduire ces conséquences graves qui pèsent sur ceux qui sont touchés par ce fléau et sur la société toute entière. L’un des moyens consiste à agir sur la „programmation“ intervenant au cours de la petite enfance.

Qu’est-ce que l’épigénétique ?

Le fait d’avoir observé que la nutrition de façon prédominante, mais aussi d’autres conditions environnementales, peuvent pendant une fenêtre de temps critique, modifier l’expression des gènes et par conséquent le phénotype associé à ces gènes, a fait naître un nouvel axe de recherche passionnant – l’épigénétique.

A la différence des mutations qui résultent de variations génétiques de la séquence d’ADN (Single Nucleotide Polymorphism, SNPs), c’est-à-dire de variations de la séquence nucléotidique au sein d’une molécule d’ADN, les modifications de phénotype liées à des modifications épigénétiques sont liées à des conditions environnementales particulières et se matérialisent par des marques biochimiques comme des méthylations. La méthylation est le transfert par des enzymes (DNA méthyltransférases) de groupements méthyles sur des bases nucléotidiques à certains endroits de la molécule d’ADN. Le groupement méthyle est retenu aux points concernés, la méthylation n’est donc pas une mutation génétique.

Les nutriments et les composants bioactifs de l’alimentation peuvent influencer, activer ou désactiver l’expression de certains gènes – sans modifier leur séquence ADN. Prenons un exemple pour mieux illustrer ce principe : lorsqu’une souris femelle dite agouti, obèse et au pelage jaune, est nourrie avec un cocktail de vitamine B12, d’acide folique, de bétaïne et de choline durant sa gestation, elle donne naissance à des souriceaux minces, de pelage brun et en parfaite santé. Dans ce cas, la modification est épigénétique et non génétique.

Programmation précoce – Succès à long terme

Les études à long terme menées en Gambie – pays sans aucune précipitation six mois de l’année et où les aliments frais sont insuffisants – ont permis de faire des observations étonnantes : les enfants nés avec un poids corporel normal s’y sont développés selon les normes de l’OMS avec une courbe de croissance correspondant au 50ème percentile alors que les nouveau-nés de faible poids par rapport à leur âge gestationnel ont eu une courbe de croissance considérablement inférieure.

Les deux groupes d’enfants ont été allaités de façon exclusive pendant six mois et n’ont reçu aucun apport protéique supplémentaire. La programmation commence donc dans le ventre de la mère et dépend des apports en nutriments pendant la période prénatale. Ce profil de développement ne vaut pas uniquement pour la Gambie, puisqu’il a récemment été confirmé par d’autres données publiées issues de recherches menées au Zimbabwe. Lorsque le poids de naissance est correct et que le nouveau-né est allaité, celui-ci connaît un développement normal – même si ses apports en protéines après la naissance sont très faibles. Cette réalité était jusqu’ici passée inaperçue.

Il est difficile de corriger les effets d’une malnutrition intra-utérine après la naissance. Les mères doivent veiller à leur nutrition. Comme le montre une revue récente, le risque de donner naissance à un nouveau-né de faible poids pour l’âge gestationnel peut être réduit d’un tiers lorsque les jeunes mères prennent des compléments nutritifs appropriés, préférentiellement durant la grossesse (Bhutta, Lancet 2013). Il est également souhaitable d’éviter d’être en situation d’obésité et de prendre trop de poids durant cette période.

Ce qu’il faut retenir

Le phénotype d’une personne, en d’autres termes les caractéristiques spécifiques de son organisme telles que sa corpulence, son développement, ses caractéristiques biochimiques et physiologiques ou son comportement, etc. n’est pas déterminé uniquement par son patrimoine génétique. Durant certaines périodes sensibles, des conditions environnementales peuvent programmer le métabolisme, le système immunitaire et les fonctions d’autres organes.

Parmi ces conditions environnementales, la nutrition joue un rôle primordial dans la programmation métabolique.

Pour en savoir plus :

https://www.nestlenutrition-institute.org/resources/online-conferences/Pages/Nutrition_during_The_1000_First_Days_and_Non_Communicable_Disease.aspx

Références :

Kurth et al., Die Prävalenz der Aufmerksamkeitsdefizit-/ Hyperaktivitätsstörung (ADHS) bei Kindern und Jugend lichen in Deutschland, Bundesgesundheitsbl - Gesundheitsforsch - Gesundheitsschutz 2007 · 50:827–835

*Taı¨eb A. Atopic dermatitis: definition, epidemiology, natural history, severity

and scores. Annal Dermatol Ve´ ne´ re´ ol 2005;132[Spec no. 1], 1S35-1S43

Bhutta et al., Evidence-based interventions for improvement of maternal and child nutrition: what can be done and at what cost? Maternal and Child Nutrition 2, 2013, S0140-6736(13)60996-4

 

Date de publication : 19/11/2015

 

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