L’Anses a fait le point sur les impacts de la répartition temporelle des prises alimentaires à partir des données de la littérature afin d’actualiser les repères du PNNS. Les objectifs étaient d’établir des repères théoriques (fréquence et structure des prises alimentaires, heure et durée des repas, régularité des repas et jeûne) et de comparer les repères théoriques aux données observées dans l’étude Inca 3. Enfin, il s’agissait de formuler des préconisations pour l’établissement de recommandations relatives à la répartition temporelle des prises alimentaires en lien avec les paramètres de santé, les rythmes biologiques et la consommation de la population vivant en France.
Pour cela, une analyse de la littérature scientifique disponible a été menée par le groupe de travail « Chrononutrition » dont les conclusions sont présentées ci-dessous et qui permet d’identifier les signaux faibles. Une seconde analyse a été réalisée par le CES nutrition humaine qui n’a retenu que les études épidémiologiques longitudinales et les essais contrôlés et randomisés.
Le risque de développer des maladies chroniques analysé
Des revues systématiques et des méta-analyses ont été recherchées au sujet de l’effet du nombre de prises alimentaires quotidiennes et de leurs horaires sur le risque de développer des maladies chroniques non transmissibles, sur l’effet de la durée du jeûne nocturne et de la distribution journalière des apports en énergie et en micro et macronutriments sur ce risque. Au final, 100 articles répondant aux critères d’inclusion ont été retenus.
Pas de conclusion sur le nombre de prises alimentaires
Les données sont insuffisantes pour établir un lien entre le nombre quotidien de prises alimentaires et le risque de surpoids, d’obésité, de diabète de type 2, de maladies cardiovasculaires, de cancer et de mortalité.
Privilégier un dîner tôt en soirée
L’analyse de 61 études permet au groupe de travail de conclure qu’un retard de plusieurs heures des prises alimentaires et en particulier un dîner tardif et/ou trop proche du coucher (moins de 2 heures chez l’adulte) est corrélé positivement à un risque accru de prise de poids et d’obésité, et à des complications métaboliques. Quant à l’effet des horaires des repas sur le risque de cancers, les données ne permettent pas de généraliser les conclusions à la population française mais leur concordance pour les cancers du sein et de la prostate soulève la question du rôle des rythmes de prises alimentaires dans ces pathologies.
Prolonger le jeune nocturne
Dix-huit études ont été retenues pour évaluer l’effet de la durée du jeûne nocturne sur les paramètres de santé. Certaines données suggèrent une association entre un jeûne nocturne prolongé mais conservant le petit déjeuner et une réduction des facteurs de risque cardiométabolique chez les adultes. En revanche, un jeûne prolongé par l’absence de petit déjeuner est associé à une augmentation du risque cardiométabolique. Concernant les paramètres liés à l’adiposité, les résultats sont discordants.
Réduire les apports du soir
Cinquante études ont été analysées pour évaluer l’effet de la distribution journalière des apports en énergie et en macronutriments sur les paramètres de santé. Les données suggèrent une association entre une proportion plus élevée de l’apport calorique journalier pris le soir et l’augmentation : (i) de différents indices de prise de poids (variation du poids, augmentation de l’indice de masse corporelle (IMC) et risque de surpoids ou d’obésité) chez les adultes et les personnes âgées ; et (ii) de l’insulinorésistance et du cholestérol-LDL dans la population d’adultes. Elles révèlent aussi une association inverse entre la proportion de l’apport calorique journalier pris au petit déjeuner et le poids ou la prise de poids. Une proportion plus élevée de l’apport calorique journalier pris au petit déjeuner par rapport au dîner est aussi associée à une meilleure tolérance au glucose (dans la population adulte). Enfin, un apport glucidique plus important le soir est associé à une augmentation des marqueurs d’insulinorésistance, alors qu’un apport glucidique plus important en matinée est associé à une meilleure tolérance au glucose, pour la population adulte.
Le CES nutrition humaine modère ces interprétations
Le CES nutrition humaine considère que les données incluses dans la revue sont encore insuffisantes pour établir un lien entre le nombre de prises alimentaires, leurs horaires et le risque de développer des maladies chroniques non transmissibles. De même, concernant la durée du jeune nocturne. Concernant la distribution journalière des apports en énergie, seule l’association positive entre le pourcentage élevé de l’apport énergétique reçu le soir et le risque d’obésité est retenue mais doit être confirmée.
Toutefois, dans l’attente des résultats d’études supplémentaires pour statuer sur la force de ce lien, l’Anses préconise d’ores et déjà, de réduire la proportion de l’énergie journalière apportée le soir et de dîner suffisamment tôt de façon à respecter un délai approximatif de deux heures entre le dîner et le coucher. L’Anses précise que ces recommandations concernent la population générale en bonne santé hors femmes enceintes ou allaitantes et personnes âgées. Elles ne s’adressent pas aux personnes malades, cherchant à perdre ou à prendre du poids.
Anses — Actualisation des repères du PNNS : répartition temporelle des prises alimentaires — rapport d’expertise collective — mars 2024. https://www.anses.fr/ fr/content/petit-dejeuner-diner-quelle-repartition-des- prises-alimentaires-journee.
C. Costa
Date de publication : 01/10/2024
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