Cette étude explore le phénomène du mimétisme alimentaire, qui veut que nous adaptions notre consommation à celle de nos convives : nous mangeons davantage si nos convives consomment beaucoup.
Pour mieux comprendre les mécanismes du mimétisme alimentaire, les auteurs ont mené deux études.
Dans la première, les investigateurs ont voulu étudier le comportement alimentaire de participants mangeant soit face à un ami soit face à un inconnu. Dans le cadre de cette étude, 110 étudiantes ont été recrutées (âge moyen : 18,8 +/- 1 ans). Elles pouvaient venir accompagnées ou seules : une participante qui venait seule était appariée avec une autre participante. Dans les deux cas, elles remplissaient un questionnaire sur le niveau de proximité avec leur accompagnant. Elles évaluaient également leur niveau de confort (d’« extrêmement à l’aise » à « pas du tout à l’aise ») avec celui-ci. Elles étaient invitées à répondre à un questionnaire démographique et à évaluer leur appétit et leur humeur. Ensuite, l’investigateur leur proposait d’écrire leurs réflexions devant un poster prônant l’écologie. Les participantes pouvaient débattre avec la personne qui les accompagnait pendant 10 minutes. Un bol de confiseries au chocolat (100 g soit 505 Kcal) était placé à côté de chaque participante pendant cette phase. Au bout des 10 minutes, l’investigateur leur remettait de nouveaux questionnaires d’évaluation de l’humeur et de l’appétit. Les étudiantes devaient également évaluer leur niveau de satisfaction vis-à-vis des confiseries au chocolat qui leur avaient été proposées. Enfin, on mesurait leur poids et leur taille. Les participantes qui avaient deviné l’objet de l’étude étaient exclues de l’essai.
Parmi les participantes qui ont terminé l’étude, 29 étaient venues accompagnées, 20 seules et donc appariées avec une autre participante. En moyenne, les étudiantes accompagnées se sentaient plus à l’aise (7,0 ± 0,9) que celles qui étaient venues seules (5,6 ± 1,2) et avaient consommé plus de confiseries (32 ± 23,6 g vs 18,5 ± 15,8 g). Les caractéristiques qui pouvaient éventuellement influer sur les résultats (IMC, faim à l’inclusion, degré d’appréciation de la confiserie…) n’étaient pas différentes entre les deux groupes. La consommation de confiserie était corrélée à celle du convive dans le groupe « participante seule » (degré de corrélation : 0,92, p < 0,001) et dans le groupe « participante accompagnée » (degré de corrélation : 0,82, p < 0,001), sans différence significative entre les deux groupes, suggérant que le mimétisme alimentaire n’était pas influencé par le niveau de proximité du convive.
Dans la seconde étude, 82 étudiantes ont été recrutées. Elles étaient appariées avec une de leurs amies. Dans 66% des cas, les étudiantes déclaraient être des amies proches, dans 33% des connaissances et dans 6% des colocataires. Les investigateurs voulaient cette fois explorer l’influence du type de nourriture sur le mimétisme alimentaire. Deux groupes étaient formés : dans le premier, les participantes avaient accès au même type de snack (confiseries au chocolat), dans l’autre, les snacks étaient différents mais de même densité énergétique (confiseries au chocolat et snacks au fromage). Chaque paire d’étudiantes était assignée aléatoirement à l’un des deux groupes. Comme dans la première étude, les participantes devaient répondre à des questionnaires évaluant leur niveau de familiarité avec leur accompagnante, leur humeur et leur appétit. Cette fois, les étudiantes étaient invitées à jouer au pendu pendant 10 minutes, et chacune avait accès à un bol de 30 snacks. Après les 10 minutes, leur niveau d’appétit, leur humeur et leur appréciation du snack étaient évalués. On mesurait également leur poids et leur taille.
En moyenne, les étudiantes avaient mangé 8 ± 5,6 snacks dans le groupe où les snacks étaient identiques et 10 ± 7,1 dans le groupe où les snacks étaient différents. Les caractéristiques qui pouvaient éventuellement influer sur les résultats (IMC, faim à l’inclusion …) n’étaient pas différentes entre les deux groupes, sauf en ce qui concerne l’appréciation du snack où les différences étaient plus marquées dans le groupe où les snacks étaient différents.
La consommation de snacks était corrélée à celle du convive de façon modérée au sein des paires de participantes : 0,52 dans le groupe où les snacks étaient identiques (non significatif) et 0,74 dans l’autre groupe (p=0,002). Les différences de corrélation entre les deux groupes n’étaient pas significatives, suggérant que le mimétisme alimentaire n’était pas influencé si le convive avait accès à une nourriture différente.
Ce qu’il faut retenir :
Dans ces deux études, les participantes ont eu tendance à caler leur niveau de consommation de snacks sur celui de leur convive. Ce mimétisme alimentaire n’a pas été significativement influencé par le fait que le convive soit un ami ou un inconnu ou par le type de snack, suggérant que ce phénomène de mimétisme est particulièrement robuste.
Kaisari P, Higgs S. Social modelling of food intake. The role of familiarity of the dining partners and food type. Appetite. 2015 ; 86 : 19-24.
Date de publication : 09/12/2015