Les évolutions de mode de vie et de consommation ont entrainé depuis plusieurs années une nette augmentation de la prévalence du surpoids et de l’obésité en France. Les conséquences de cette progression, tant en termes de santé (risque accru de maladies cardio vasculaires ou de diabète) qu’en termes médico-économiques, deviennent un véritable enjeu de santé publique en France comme dans les autres pays.
Définition : quand peut-on parler de surpoids et d’obésité ? 1
Le surpoids et l’obésité sont définis comme une accumulation anormale ou excessive de graisse corporelle qui peut nuire à la santé. Toutefois, l’importance de la masse grasse n’est pas toujours corrélée au surpoids.
Le diagnostic de surpoids et d’obésité repose sur l’indice de masse corporelle (IMC).
L’évaluation du surpoids et de l’obésité 1
Le surpoids et l’obésité sont définis par calcul sur la base des mesures données par la toise et la balance.
L’indice de masse corporelle (IMC) est la méthode la plus utilisée :
IMC = Poids (Kg) / [Taille (m)]2
|
IMC (kg/m²) |
Insuffisance pondérale |
< 18,5 |
Poids normal |
18,5-24,9 |
Surpoids |
25,0-29,9 |
Obésité |
≥ 30 |
Ces définitions peuvent s’appliquer chez la femme comme chez l’homme adulte (plus de 18 ans) et sont acceptables jusqu’à 65 ans. Au-delà, il n’existe pas de définition consensuelle de l’obésité.
Pour un IMC compris entre 25 et 35 kg/m², l’examen clinique devra être complété par la mesure du tour de taille à mi-distance entre la dernière côte et le sommet de la crête iliaque. En pratique, le tour de taille est l’indice le plus simple pour estimer l’importance des dépôts adipeux abdominaux, compartiment graisseux critique. Il est mieux corrélé à la graisse abdominale que le rapport taille/hanche. L’excès de graisse au niveau abdominal chez l’adulte est associé, indépendamment de l’IMC, au développement des complications métaboliques et vasculaires de l’obésité.
Un tour de taille ≥ 80 cm chez la femme et ≥ 94 cm chez l’homme sont retenus pour définir l’obésité abdominale.
Épidémiologie : le surpoids et l’obésité chez l’adulte en France 2
Par rapport à d’autres pays industrialisés, l’augmentation de la prévalence de l’obésité chez l’adulte reste modérée en France. L’étude Obépi 2009, réalisée en collaboration avec l’INSERM, donne une photographie de la situation concernant l’obésité et le surpoids en France. Elle permet d’en évaluer la progression tous les 3 ans.
Une augmentation rapide
La France compte aujourd’hui 14,3 millions de sujets en surpoids et 6,5 millions d’obèses. La prévalence du surpoids est estimée à 31,9 % de la population adulte et celle de l’obésité à 14,5 %.
La prévalence de l’obésité est passée de 8,5 % en 1997 à 14,5 % en 2009, soit une augmentation de près de 6 % par an depuis 12 ans !
Cette prévalence est en augmentation depuis plusieurs années : +10,7 % entre 2006 et 2009.2
Évolution de la prévalence du surpoids (S) et de l’obésité (O) (IMC ≥ 30 kg/m²) chez les 18 ans et plus (%) dans les enquêtes Obépi-Roche de 1997 à 2009 2
1997 | 1997 | 2000 | 2000 | 2003 | 2003 | 2006 | 2006 | 2009 | 2009 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
S | O | S | O | S | O | S | O | S | O | |
Total | 29,8 | 8,5 | 30,6 | 10,1 | 31,5 | 11,9 | 30,6 | 13,1 | 31,9 | 14,5 |
Hommes | 36,9 | 8,8 | 38,3 | 10,3 | 39,1 | 12 | 37,5 | 12,5 | 38,5 | 13,9 |
Femmes | 23,3 | 8,3 | 23,5 | 10 | 24,5 | 11,9 | 24,2 | 13,6 | 26 | 15,1 |
Une augmentation avec l’âge
Depuis 1997, quel que soit le sexe, la prévalence de l’obésité augmente avec l’âge. Aucune tranche d’âge n’est épargnée. Entre 2006 et 2009, les 25-34 ans représente l’augmentation la plus importante : + 19,5 %. Pour les autres tranches d’âge, l’augmentation relative varie entre +5,3 % et +8,5 %.
Évolution de la prévalence de l’obésité par tranches d’âge (chiffres arrondis)
Des différences socio-économiques
Aucune catégorie socio-démographique ou professionnelle n’est épargnée. En 2009, la prévalence de l’obésité augmente dans toutes les catégories socio-professionnelles mais à des vitesses inégales. L’augmentation la plus importante s’est faite chez les inactifs dont la prévalence est passée de 6 % en 1997 à 13 % en 2009 soit +106,6 % en 12 ans. Les autres augmentations relatives les plus importantes ont été observées chez les agriculteurs (+94,6 % depuis 1997), les ouvriers (+82 %), et les employés (+88,5 %). L’augmentation la plus faible a quant à elle été observée chez les cadres supérieurs avec +37,9 % depuis 1997.
Évolution de la prévalence de l’obésité en fonction de la profession de l’individu entre 1997 et 2009
Des différences selon les régions françaises
La prévalence de l’obésité n’est pas homogène sur l’ensemble du territoire français. On constate en 2009, que la prévalence est nettement plus élevée dans les régions Nord, Est et Bassin Parisien. Les 5 autres régions ont quant à elles des prévalences relativement proches et toutes inférieures à la moyenne nationale. En termes d’évolution, les chiffres diffèrent également en fonction des régions. Le Nord, région où la prévalence est la plus élevée en 2009, présente une des plus faibles évolutions sur 12 ans (+51,9 % entre 1997 et 2009) derrière le Sud-Est (+44,2 %). Les régions où l’augmentation est la plus importante sont la Région Parisienne (+88,6 %), l’Est (+82,8 %) et l’Ouest (+81,9 %).
Prévalence de l’obésité selon les régions en 2009 et évolution depuis 12 ans
Des risques élevés 2
Les personnes présentant une obésité sont plus susceptibles de souffrir d’un certain nombre de maladies graves, pouvant limiter l’espérance de vie. Parmi ces complications on retrouve :
- diabète
- dyslipidémies
- hypertension artérielle
- athérothrombose et pathologie cardiovasculaire
- troubles respiratoires
- pathologies hépato-biliaires
- troubles de la fertilité
- atteintes de l’appareil locomoteur
- cancers
- difficultés psychosociales
Au total, l’obésité entraîne de multiples conséquences néfastes :
- elle met en cause le bien-être somatique, psychologique et social de l’individu,
- elle entraîne une augmentation significative de la mortalité et de la morbidité.
Par sa fréquence, ses conséquences morbides et l’augmentation de sa prévalence, l’obésité constitue un réel problème de santé publique.
Le bilan initial : interrogatoire et examen clinique
Les objectifs de l’examen clinique seront de :
- définir le type d’obésité et de pouvoir ainsi définir des objectifs de prise en charge
- dépister une étiologie particulière
- dépister d’éventuelles complications
Comme lors de toute démarche diagnostique, l’anamnèse est le premier temps de la consultation. Ceci est tout particulièrement vrai face à un patient obèse, car le médecin pourra, au travers d’un travers d’un interrogatoire simple mais complet, identifier, la plupart du temps, les éléments déterminants de la maladie.
Rechercher les facteurs favorisant la prise de poids 1
- Apports énergétiques excessifs : alimentation trop riche, trop dense en calories, boissons sucrées, grande taille des portions
- Arrêt ou réduction de l’activité physique et sportive
- Arrêt du tabac non accompagné de mesures adaptées
- Consommation d’alcool
- Prise de certains médicaments : neuroleptiques, antidépresseurs, antiépileptiques, insuline, sulfamides hypoglycémiants, corticoïdes
- Facteurs génétiques et antécédents familiaux d’obésité
- Antécédents d’obésité dans l’enfance
- Grossesse
- Ménopause
- Troubles du comportement alimentaire
- Troubles anxio-dépressifs et périodes de vulnérabilité psychologique ou sociale
- Facteurs professionnels : stress au travail, travail posté
- Diminution du temps de sommeil
Identifier un trouble du comportement alimentaire 1
Les troubles du comportement alimentaire associés à l’obésité peuvent être divers, résultant soit de compulsions alimentaires, ou moins fréquemment, l’hyperphagie boulimique.
Voir la rubrique sur les troubles du comportement alimentaire.
Retracer l’histoire pondérale du patient 1
- Âge de début de la prise de poids (enfance, adolescence, âge adulte)
- Circonstances déclenchantes : événements familiaux, professionnels
- Poids maximum et minimum à l’âge adulte
- Variations récentes du poids (gain, perte, depuis quand, de combien, pourquoi)
- Régimes suivis (actuellement, dans le passé), avec les modalités d’encadrement
- Nombre, amplitude et contexte des rechutes et récidives de prise de poids
- Poids de forme, poids auquel le patient se sent bien
Évaluer les habitudes alimentaires et l’activité physique du patient 1
Il est nécessaire d’évaluer les habitudes alimentaires pour estimer les apports énergétiques et d’évaluer l’activité physique pour estimer la dépense énergétique.
- Habitudes alimentaires
- Repas :
> heures habituelles, comment (debout/assis, seul/en compagnie, au restaurant, vite/en prenant le temps de manger, habitude de se resservir à table)
> gouter, collation ou en-cas ?
> grignotage : horaire, fréquence, circonstances déclenchantes, pourquoi (faim, ennui, envie, gourmandise, contrariété), aliments consommés, quantité
> habitude de sauter une repas ? (fréquence)
> habitude de manger la nuit ? (dans la soirée, à l’endormissement, après des réveils nocturnes)
> sensations subjectives : faim, envie de manger, rassasiement, satiété
- Évaluer la taille des portions
- Habitudes d’achat des aliments : qui, où, quand, combien, comportement de stockage
- Préparation des repas : qui, mode de cuisson, d’assaisonnement
- Apports alimentaires
> consommations de boissons sucrées et de boissons alcoolisées
> consommation d’aliments à forte densité énergétique riches en lipides, en sucres
> consommation d’aliments à faible densité énergétique
Une analyse des activités quotidiennes et des capacités physiques du patient doit être systématiquement réalisée.
- Activité physique et occupations sédentaires
- Profession principale
- Horaires normaux ou décalés
- Intensité approximative de l’activité physique professionnelle (faible, modérée, élevée)
- Activités domestiques réalisées à domicile et leur intensité approximative
- Activités de loisirs et activités sportives actuelles et antérieures (intensité, durée, fréquence)
- Transport et trajet pour se rendre au travail ou dans les magasins, temps de trajet habituel, mode de trajet
- Utilisation préférentielle des ascenseurs ou des escaliers
- Temps passé devant un écran (heure/jour)
- Temps passé en position assise (heure/jour)
Rechercher les conséquences de l’excès de poids 1
- Bilan des complications somatiques
- HTA : mesure de la pression artérielle avec un brassard adapté
- dyspnée d’effort
- angor
- apnée du sommeil, endormissement diurne, ronflement, asthénie matinale
- douleurs articulaires : genoux, hanches, chevilles, lombaires
- macérations des plis, mycoses,
- insuffisance veineuse, lymphoedème
- incontinence urinaire
- anomalies du cycle menstruel
- signes d’orientation de présence d’un cancer : métrorragies, examen des seins...
- Retentissement psychosocial
- l’obésité est source de souffrance psychologique
> Troubles anxio-dépressifs, perte de la libido
> Troubles du comportement alimentaire secondaire à l’obésité
- l’obésité est source de difficultés sociales
> Difficultés à l’embauche
> Discrimination
> Stigmatisation
> Arrêts de travail, perte du travail,
> Isolement
- l’obésité peut altération de la qualité de vie
Examens complémentaires de 1ère intention 1
- Glycémie à jeun (chez les sujets âgés de plus de 45 ans ayant un IMC ≥ 28 kg/m²
- Exploration de l’Anomalie Lipidique (EAL)
Pour en savoir plus
- Nestlé Nutrition Institute et la rubrique Weight Loss & Obesity
- Kit INPES : Utiliser le disque d’indice de masse corporelle en pratique clinique
Sources
- HAS. Recommandations de bonne pratique. Surpoids et obésité de l’adulte : prise en charge médicale de premier recours. Recommandations pour la pratique clinique. Argumentaire. Septembre 2011.
- ObEpi - Roche 2009. Enquête épidémiologique nationale sur le surpoids et l’obésité. Une enquête INSERM / TNS HEALTHCARE / ROCHE.
Date de publication: 10/12/2012