Les Français sont mieux informés du rôle de l’alimentation dans la survenue des cancers mais se focalisent trop sur les aliments à risque et pas assez sur ceux protecteurs.
La majorité des Français pense que l’alimentation a un rôle possible dans la survenue d’un cancer, comme le révèle la quatrième édition du baromètre cancer. Le point sur l’évolution des croyances des Français sur les facteurs de risque nutritionnels associés.
Pour rappel, le Baromètre cancer, réalisé depuis 2010 par l’Institut national du cancer et Santé publique France, repose sur l’analyse d’une enquête téléphonique menée tous les cinq ans sur un échantillon français aléatoire, qu’il interroge sur les croyances, perceptions, connaissances, opinions et comportements sur les cancers, leurs facteurs de risque, le dépistage et les moyens de prévention. Le baromètre 2021 se décline en huit chapitres dont cinq sont consacrés aux facteurs de risque (tabac, alcool, ultra-violets, cigarette électronique et nutrition).
La première cause de mortalité en France
Selon des données de 2018, 3,8 millions de personnes en France métropolitaine vivent avec ou après avoir eu un cancer et on estime à 382 000 le nombre de nouveaux cancers diagnostiqués chez les adultes : ce nombre est en constante augmentation. Les cancers touchent davantage les hommes (54 %), les cancers de la prostate, du poumon et du côlon- rectum ayant chez eux l’incidence la plus élevée. Chez la femme, les cancers du sein, du côlon-rectum et du poumon restent les plus fréquents.
Les progrès de la médecine et de la prévention ont permis une réduction du taux standardisé de mortalité entre 2010 et 2018 (2 % pour les hommes et 0,7 % pour les femmes). Depuis les années 2000, les cancers restent néanmoins en France la première cause de mortalité globale comme prématurée.
La moitié des Français bien informée
Parmi les 4938 enquêtés interrogés, 91,8 % perçoivent l’alimentation comme jouant un rôle important sur le risque de développer un cancer et 55,9 % des personnes interrogées déclarent être très bien ou plutôt bien informées sur les risques de cancers liés à l’alimentation. Cependant, la perception de l’importance de l’alimentation change selon les caractéristiques des participants. Ainsi, l’importance de l’alimentation est mieux appréhendée par les non-fumeurs, les personnes qui ont un IMC dit « normal » (entre 18,5 et 24,9), les personnes qui se sentent très bien informées sur les risques de cancers liés à l’alimentation, les personnes qui ont consulté un médecin généraliste au cours des 12 derniers mois, les personnes qui sont ou ont été soignées pour un cancer, les personnes qui pensent courir un risque d’avoir un cancer et les personnes ayant un proche atteint de cancer.
Une perception plutôt bonne des facteurs nutritionnels
Parmi les groupes alimentaires perçus comme facteur de risque de cancer, les viandes rouges et charcuteries sont les plus citées (respectivement : 62,4 % et 74,1 %). Pour la première fois, on apprend que la consommation d’aliments ultra-transformés est perçue comme augmentant le risque de cancer (88,2 %) tandis que les compléments alimentaires sont considérés par la moitié des sujets (52,6 %) comme n’ayant pas d’impact sur le risque de cancer et par 33,6 % comme un facteur de risque. De fait, l’édition de 2021 a ajouté des questions sur de nouveaux groupes d’aliments (féculents complets, aliments ultra-transformés, aliments bio et légumes secs) et sur la pratique du jeûne et la consommation de compléments alimentaires.
Concernant les facteurs protecteurs, la consommation de fruits et légumes est perçue par une majorité des enquêtés (62,0 %) comme diminuant le risque de cancers. Les produits laitiers et les féculents complets ne sont perçus comme protecteurs que par 12,7 % et 36,6 % des enquêtés. Plus de la moitié (respectivement, 67,8 % et 58,1 %) jugent en effet qu’ils n’ont pas d’influence sur le risque de cancer. La perception des aliments bio divise les Français : la moitié les estime protecteurs, l’autre sans influence. Les légumes secs et les poissons sont considérés par 43,2 % et 40,4 % comme ayant un impact protecteur sur le risque de cancer. La pratique du jeune est perçue en majorité (72,1 %) comme sans influence.
Notons que le caractère protecteur ou à risque des groupes d’aliments est dans l’ensemble mieux appréhendé par les plus diplômés, les cadres et professions intellectuelles supérieures, ceux qui pensent courir un risque ou qui ont un proche atteint de cancer. L’âge et l’IMC peut aussi faire varier la perception des sujets.
Une focalisation sur les facteurs de risque
Depuis le premier baromètre en 2010, l’importance perçue du rôle de l’alimentation sur la survenue d’un cancer n’a fait qu’augmenter (+6 points en 11 ans). De même, la quasi- totalité des personnes interrogées a désormais un avis sur les différents facteurs nutritionnels questionnés : en 2021, seuls 2 % indiquent « ne sait pas » contre 23 à 57 % en 2010. Cependant, avec le temps, les sujets semblent se focaliser davantage sur les aliments à risque que ceux protecteurs.
Ainsi, la perception du risque associé à la consommation de viandes rouges a gagné 30 points en 11 ans, et celle sur les charcuteries 25 points tandis que la perception du rôle protecteur des fruits et légumes a modestement augmenté (+6,5 points). L’idée de leur absence d’influence a même gagné 15,5 points. Les communications des médias sur la contamination des fruits et légumes par les pesticides seraient-elles en cause ?
De même pour les produits laitiers : +4,7 points de par tisans de leur fonction protectrice contre +37,4 points en faveur de l’absence d’influence. Sans compter que la proportion de sujets pensant qu’ils peuvent augmenter le risque de cancer a triplé (+13,8 points). Les études récentes rapportant des associations délétères avec le cancer de la prostate en sont-elles la cause, tout comme l’évolution à la baisse des recommandations de leur consommation dans le dernier PNNS (passant de 3 à 2 produits laitiers par jour) ? Concernant les groupes d’aliments pour lesquels aucun risque avéré de cancer n’a été démontré (viande blanche, poisson), les sujets sont de plus en plus nombreux à penser qu’ils n’ont pas d’influence. Aliments bio, féculents complets, légumes secs, compléments alimentaires et aliments ultra-transformés n’étant pas intégrés dans les précédentes éditions, aucune comparaison de l’évolution de leur perception n’est encore possible.
Au final, les résultats du Baromètre cancer 2021 montrent globalement une évolution favorable des perceptions de la population sur les facteurs de risque et de protection des cancers liés à la nutrition. La population semble être bien sensibilisée sur ce sujet. Les hommes le sont, en 2021, autant que les femmes, et les jeunes, davantage que les plus âgés. Un effet des réseaux sociaux ?
Le point sur la relation entre nutrition et cancer
https://www.nutripro.nestle.fr/article/relation-entre-nutrition-et-cancer
Source : Baromètre Cancer 2021. Attitudes et comportements des Fran¸cais face au cancer. Focus sur le chapitre Nutrition et Cancer : Perception des facteurs de risque et des facteurs protecteurs. https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/tabac/documents/rapport-synthese/barometre-cancer-2021.-attitudes-et-comportements-des-francais-face-au-cancer
C. Costa « © Société Française de Nutrition. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés »
Date de publication : 22/05/2023
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