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Depuis quelques dizaines d’années, les lipides, bien qu’indispensables en nutrition, étaient à consommer en excès. Mais au fil des années, certains acides gras comme les oméga 3 ont été valorisés. L’ANSES (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire) vient de réévaluer les apports nutritionnels conseillés (ANC) en lipides.

Après saisine, l’ANSES a remis ses conclusions le 1er Mars 2010 et a réactualisé les nouveaux ANC pour les acides gras (AG), en tenant compte des données scientifiques acquises depuis 2001.
La nouvelle classification se base « sur la différenciation entre les AG indispensables et les AG non indispensables », dixit le Pr Philippe Legrand, président de la Commission.

ANC 2010 en lipides pour un adulte consommant 2000 kcal/jour (en % de l’apport énergétique) :

Lipides totaux : 35-40 %    
AG indispensables acide linoléique : 4 % des apports lipidiques totaux
  acide α-linolénique : 1 % des apports lipidiques totaux
  DHA : 250 mg
     
     
AG non indispensables EPA : 250 mg
  C12 + C14 + C16 : ≤ 8 % des apports lipidiques totaux
  AGS totaux : ≤ 12 % des apports lipidiques totaux
  acide oléique : 15-20 % des apports lipidiques totaux
  autres AG non indispensables : non précisé

Le texte complet définit l’intérêt des différents AG et leurs apports souhaitables, en terme de prévention de certaines pathologies (syndrome métabolique, diabète, obésité, pathologies cardio-vasculaires, cancers du sein et du colon, pathologies neuro-psychiatriques et DMLA).
Les AG saturés ne sont plus considérés de façon monolithique, sont distingués en fonction des effets des divers AGS (cf article suivant).
En 2001, les ANC des lipides totaux étaient de 30 à 35 %. Les augmenter de 5 % revalorise les lipides, en raison des effets préventifs de certains AG. Le besoin physiologique minimal reste fixé à 30 %, mais il est souligné que vouloir diminuer les ANC en deçà de 35 %, au profit des glucides, n’induit aucun bénéfice en ce qui concerne la réduction des risques pathologiques.
La revalorisation de 5 % des ANC des lipides impose une nouvelle répartition des ANC pour les glucides et les protéines. Comme le pourcentage de protéines ne peut guère être diminué en dessous de 15 %, ces nouveaux ANC conduisent à ramener l’ANC des glucides entre 45 et 50 %.

Tous les AG saturés ont-ils le même effet métabolique ?

Les acides gras saturés ont mauvaise réputation, pourtant tous ne sont pas néfastes et c’est surtout leur apport en excès qui peut devenir délétère.
Apprendre à mieux les connaître permet de faire de meilleurs choix dans notre alimentation quotidienne.

Dans une publication récente, S. Walrand, F. Fisch et J-M Bourre font le point à leur sujet 1 pour essayer de mieux les individualiser.
Les acides gras saturés (AGS) ont des atomes de carbone reliés entre eux par de simples liaisons, ils portent le maximum d’hydrogènes possibles, c’est pourquoi la molécule est dite saturée.
Les AGS représentent 44 % des apports d’AG (39 % AGMI, 17 % AGPI), soit 32 g/j chez les femmes et 36 g/j chez les hommes.

Effets sur les maladies métaboliques

Parmi les AGS, l’acide palmitique, consommé en excès, est reconnu comme ayant un rôle délétère, dans la mesure où il altérerait la sensibilité à l’insuline (favorisant l’insulinorésistance) et la réponse inflammatoire au niveau de différents tissus. Ce rôle qui induirait l’apparition et le développement des maladies métaboliques comme le diabète de type 2 et/ou la survenue d’affections cardio-vasculaires. Ceci survient en cas de surconsommation d’AGS, d’où accumulation des métabolites des lipides, comme les céramides. En outre, le tissu adipeux se conduit en véritable tissu endocrine qui secrète des substances pro-inflammatoires (adipokines) impliquées dans l’obésité, les pathologies vasculaires et le syndrome métabolique.

Effets sur la composition corporelle

Les AG alimentaires se comportent aussi comme des hormones adipogéniques : outre l’hypertrophie adipocytaire, de nouveaux adipocytes sont recrutés (hyperplasie). Mais tous les AG ne sont pas équivalents pour stimuler le développement du tissu adipeux. Les régimes hyperlipidiques enrichis en AGPI oméga 3 n’entraînent pas d’obésité chez le rat ; par contre, si la ration est riche en AGPI oméga 6 ou en AGS, on observe un développement hypertrophique et hyperplasique du tissu adipeux blanc.

Effets sur le risque cardio-vasculaire

Il est prouvé que l’excès global d’AGS alimentaires participe à l’étiologie des maladies cardio-vasculaires (MCV), en particulier par l’augmentation de la cholestérolémie (LDL-cholestérol). Mais selon la longueur de leur chaîne carbonée, ils influencent différemment la lipémie plasmatique. Le LDL-cholestérol est modérément augmenté par les acides laurique (12:0) et myristique (14:0), mais fortement majoré par l’acide palmitique (16:0). Quant à l’acide stéarique (18:0), il a un effet neutre, car il serait rapidement désaturé en acide oléique (AGMI). Les AGS à chaînes courtes (< 12 atomes de carbones) qu’on trouve notamment dans les produits laitiers auraient un rôle neutre vis-à-vis de la lipémie. Quant à ceux à chaîne longue (> 20 atomes de carbone), leur présence est minime dans l’alimentation et ils sont peu absorbés dans l’intestin.
Une méta-analyse regroupant 224 études d’intervention 3 confirme que les AGS en C12, 14 et 16 augmentent significativement le LDL-cholestérol, alors que l’acide stéarique (C16 :0) a un effet neutre.

En conclusion

Si l’excès d’apport d’AGS favorise l’expansion des MCV, tous n’ont pas les mêmes effets. Parmi eux, c’est l’acide palmitique qui pourrait avoir les effets métaboliques les plus délétères.

 

[1] Walrand S., Fisch F., Bourre J-M. Tous les acides gras saturés ont-ils le même effet métabolique ? - Nutrition Clinique et Métabolisme, 2010, 24, 63-75
[2] Keys A. and al. The diet and 15-year death rate in the seven countries study. Amer J Epidemiol. 1986;124: 903-15
[3] Howell WH. and al. Plasma lipid and lipoprotein responses to dietary fat and cholesterol: a meta-analysis. Am J Clin Nut 1997; 65: 1747-64

 

Date de publication: 10/12/2012

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